De larges sourires avenants : apparences trompeuses. Avec David, comme avec les autres, j'ai appris à «lire» ce sourire particulier, c'est un sourire de revenant, un peu figé, tantôt visiblement contraint, parfois faussement apaisant : le masque n'est que la forme domestiquée d'une hantise appelée à se déployer toujours plus explicitement au fil des entretiens. Il faut se protéger en permanence, de l'irruption du dragon spectral, au sommeil léger, qui menace toujours de déformer ce visage, de crever l'écran des conventions sociales, de brûler ce qu'il nous reste de norme dans la relation humaine et de décence dans les mots. Parfois, des mots, il ne peut rien être fait : c'est le moment des larmes.
Comment à la fois contourner, ne pas «déclencher» cette attaque du dragon, tout en considérant le monstre assoupi, énorme, qui gît au milieu de la pièce ? Et faut-il le faire ? Parler du traumatisme de guerre de David ? Sept guerres n'ont pas brisé David, mais la huitième... L'Irak, l'a anéanti : trois crises cardiaques, une grave et longue dépression dans laquelle s'est encastrée celle de Paulina, son alter ego «civil». La guerre en Irak de David, métamorphosée en guerre intime contre le PTSD, est devenue celle de Paulina. L'un et l'autre vont sombrer, et revenir.
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